Saturday

CONCOURS. Le clavecin à l'oeuvre


Le Festival de musique ancienne des Flandres organise à nouveau cet été ses concours internationaux de clavecin, ouverts aux musiciens de moins de 33 ans. Le programme des épreuves sera tiré du répertoire de Bach, Rameau et Scarlatti. Le festival proposera aussi des concerts et des récitals baroques empruntés aux thèmes d'Orphée et de Paris, ainsi que des ateliers ouverts à la jeunesse. Autre événement de la manifestation, une exposition de 160 clavecins et piano-forte artisanaux dans halles du beffroi de Bruges. Les finales des épreuves auront lieu le 1er août.
Novembre 2006

Monday

EDITO. L'Artmaniak nouveau est enfin arrivé!

A peine en retard sur le calendrier viticole français, le très attendu Artmaniak nouveau est enfin disponible. De quoi vous aider à digérer cette rentrée bien peu digeste où l’on apprend béats que oui, les bébés aussi peuvent se congeler, et que, littérature oblige, les bourreaux Nazis ne raflent pas que des Juifs mais aussi des Prix Goncourt.
Trois ans après la parution de son premier numéro, en Novembre 2003, le seul magazine culturel destiné aux élites ignorantes du VII° arrondissement redonne de la voix. Et change au passage d’équipe et de formule : exit la rubrique interactive « Aux arts citoyens », c’est à présent la section Province qui prendra sa place tout au long de l’année. Egalement retouchée pour ce douzième numéro, la dernière page, qui sera désormais consacrée aux trouvailles faites sur le Web.
Pour souffler sa troisième bougie, Artmaniak a choisi de s’intéresser à l’art Trash, tendance culturelle incontestable -mais très contestée- de ces dernières décennie. Ce choix mérite tout de même quelques petites explications.
La violence, qu’elle soit symbolique ou physique, extrême ou diffuse, n’est pas un phénomène social récent. Et pourtant ; relayée par des médias et des discours politiques acides, voire pervers, elle semble partager de plus en plus notre quotidien, et ce, même à distance. Car aujourd’hui, c’est bien l’idée même de violence qui nous agresse, et pas seulement ce (ou celui) qui l’inflige. En même temps que l’on se prend de compassion face à des catastrophes qui se produisent à l’autre bout de la planète, on refuse qu’une violence née et conduite à ce même endroit nous percute. Parce que cela rappelle de mauvais souvenirs. Parce que cela jamais ne console, mais affole à coup sûr.
Enfant légitime de cette coquetterie occidentale toute récente, le Trash (en anglais, déchet) met justement le doigt là où cela fait mal, là où un simple « beuârk » ne suffit plus à vomir son dégoût. Toutefois, envisagée sous un angle absurde, anecdotique ou nécessaire, le trash acquiert des lettres de noblesse. En photo, ce Père Noêl ivre mort, un bonnet cachant ce qu’il reste de dignité chez lui, nous montre qu’il est possible d’être trash sans être vulgaire, d’être politiquement incorrect sans être condamné.
Cette cuvée d’Artmaniak 2006 est déconseillée aux estomacs sensibles... Pour les autres, la dégustation débute maintenant !
Novembre 2006
Paru dans Artmaniak n°12

Sunday

THEATRE MUSICAL. Cassandre aux Ateliers

Prophétesse maudite de la mythologie grecque, Cassandre, dont les paroles clairvoyantes n'étaient jamais entendues, a passé sa vie dans l'incompréhension de ses contemporains. A partir d'un texte de l'écrivain allemand Christa Wolf, le compositeur Michael Jarrell (né en 1958) met en musique les derniers jours de ce personnage hautement tragique. Mêlant la grande et la petite histoire, il confronte les évènements officiels et ceux plus personnels de la protagoniste. L'actrice Astrid Bas, dirigée par le directeur de l'Odéon-Théâtre de l'Europe Georges Lavaudant, s'empare du texte de ce monodrame sans le chanter.
Novembre 2006

Friday

BANDE DESSINEE. Des mangas japonais... très animés

Des années 70, la France se souvient d'Histoire d'Ô, d’Emmanuelle et de Brigitte Lahaye, trois icônes porno en vente libre partout à l'époque. Mais personne ne connaissait alors les hentaï, ces mangas pour adultes qui ont depuis contaminé toute une génération d’ « Otaku », devenus plus accrocs à ces Bd qu’à n’importe quel calendrier Playboy.
En japonais, « hentaï » signifie plus que "porno", cela veut dire "perversion" ou encore "anormalité". Âmes sensibles s’abstenir, donc. Animées ou pas, ces BD classées X ont recourt à un imaginaire que seuls les fans de mangas peuvent appréhender. En effet, les héroïnes, parfois à peine pubères, vivent dans des mondes fantasmagoriques où il n’est pas rare de voir copuler androïdes et extra-terrestres. Un peu comme si Petit Cœur couchait avec Végéta dans la série Dragon Ball Z…
Contrairement à la pornographie occidentale "traditionnelle", les relations homosexuelles féminines sont absentes de ces jeux érotiques. Les mangakas préférent mettre en scène des créatures tentaculaires transperçant les jeunes héroïnes de-ci de-là. Emotions fortes garanties.
Qu'on se rassure, toutefois, car le trait du dessin et les histoires choisies sont délibérément factices; il est donc bien plus simple de différencier réalité et fantasmes que dans un film classique, où l'image stricte implique plus directement une forme de normalité, d'évidence dans la domination de la femme par l'homme. Mais le développement du hentaï révèle aussi un malaise social au Japon, dont les codes et les mœurs rigides étouffent la sphère intime et conduisent in fine à sa lente implosion.
(Novembre 2006)

Wednesday

RENCONTRE. Nicky Fasquelle, 35 ans à la tête du Magazine Littéraire


Créées en 1954, associées à Grasset cinq ans plus tard, les éditions Fasquelle ont racheté le Magazine Littéraire pour une bouchée de pain voilà bientôt quarante ans, sous l'impulsion de son fondateur, Jean-Claude Fasquelle.
Sa femme, Nicky Fasquelle, voix nasillarde et lunettes à la Duras, s’installe en face de nous. Agée, déjà, mais vieille, loin s’en faut. Italienne de naissance, débarquée en France à 17 ans, elle a vite renoncé à une carrière de pianiste. De son mariage avec Jean-Claude, nous ne saurons presque rien : ni dates, ni circonvolutions. Plutôt évasive sur sa jeunesse, elle avoue seulement n’avoir jamais travaillé. Jamais, jusqu’à ce qu’on lui propose un métier qui l’occupera pendant 35 ans : diriger le Magazine Littéraire, tout juste racheté par son mari.

Le Magazine Littéraire, nous explique-t-elle brièvement, est à la croisée du magazine et de la revue : il comprend un dossier volontairement lourd -car complet- et des rubriques annexes plus centrées sur l’actualité. Fait étonnant, les numéros les plus vendus depuis sa création sont ceux dédiés à Lacan et Foucault. L’équipe de ce mensuel ne compte pas plus d’une soixantaine de permanents « bien payés » et de pigistes -visiblement moins bien lotis.

35 ans de règne sur ce petit monde , cela grise. Cela peut rendre sceptique, également. Car on comprendra vite que le hasard n’a joué dans sa vie qu’en amont. Bien que périlleux, le poste qu’elle a tenu lui a effectivement été servi sur un plateau d’argent. Cela dit, et ne soyons pas trop acides, Nicky a prouvé ses capacités à diriger le journal, à le redresser, à lui assurer une large visibilité en France comme à l’étranger et à l’imposer comme « le » véritable magazine de l’écrit francophone. Résultat, il compte aujourd’hui parmi les dix magazines francophones les plus lus aux Etats-Unis, et exporte le cinquième de ses volumes à l’étranger, soit environ 15 000 numéros chaque mois. Un joli coup de chapeau, dont elle tire une sincère satisfaction mais point d’orgueil.

De fil en aiguille, la conversation s’éloigne peu à peu du journal. Nicky se met même à poser des questions. Et à parler littérature. Le Da Vinci Code ? Elle a aimé, oui. Houellebecq ? Pas si révolutionnaire qu’on le pense, mais pas dénué de talent non plus. Florian Zeller ? Surestimé, sans doute. A noter qu’il a proposé la création un supplément « jeunesse » au Magazine, mais que le projet n’a pas abouti. Duras ? Rencontrée une fois (seulement).
En clair, il n’est pas un écrivain que Nicky n’ai rencontré, pas un pro de la plume avec qui elle n’ait dîné. A tout hasard, elle nous propose même de rencontrer BHL. Une proposition accueillie plutôt fraîchement…

Evidemment, un tel enthousiasme décomplexé, cela intimide. Dans la salle, une poignée d’étudiants désireux de côtoyer ce petit monde commence à déchanter. Comment faire pour percer là où, visiblement, le talent seul ne suffit pas ? Nicky raille : « Les copinages ça existe, bien sûr, mais pas plus qu’entre les pharmaciens ! ». Alors elle conseille, plus confidente : faites des stages, persévérez, et surtout faites preuve d’audace. Finalement, rien de bien nouveau sous le soleil. Aux âmes bien nées la valeur n’attend point le nombre des années. Aux autres …

Bref, Nicky Fasquelle, « femme de » mais pas seulement, fait ce qu’elle veut, et elle a bien de la chance.