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PAMPHLET. Nicolas de Tavernost, vieux lion du PAF

Nicolas de Tavernost est directeur de la publication de M6.

Il est des personnalités brillantes que l’on ne saurait trop admirer, des vraies figures de proue qui nous enchantent et nous inspirent. Nicolas de Tavernost, à la direction d’ M6 depuis son lancement en 1987, n’en fait malheureusement pas partie.
Voix meurtrie et teint grisâtre, le « petit prince du PAF » devenu vieux lion de l’audimat ne s’enthousiasme guère. En le voyant ainsi, les yeux las et le regard lointain, on oublierait presque qu’il est à la tête d’une des chaînes françaises les plus navrantes, toutes catégories confondues. S’y succèdent sans complexe des émissions musicales aussi plates que répétitives (à raison de 30% de la totalité des programmes de la chaînes, difficile d’espérer mieux), des magazines mensongers, des shows de téléréalité où le ridicule (pas même le kitsch) rafle tout sur son passage… Bref, M6, c’est la petite chaîne qui montait, qui montait… et qui a fini par toucher le fond.
Métaphysique des tubes cathodiques
M6, est-il besoin de le rappeler, est une chaîne généraliste destinée aux moins de 50 ans, qui voit dans le géant TF1 son premier et plus vif concurrent. Le service public, retranché derrière des apparats de chaînes de « référence », fait office de poids plume.
Le modus vivendi de Nicolas de Tavernost est sans appel. Evoquant les achats massifs de séries américaines par sa chaîne (qui constituent peut-être son fond de commerce le moins scandaleux), il résume : « Nous achetons le droit de choisir ». La défense plaide donc coupable : M6 ne fait pas que choisir la médiocrité, elle l’achète.
En bon homme d’affaire, ce Bordelais sorti des rangs de Sciences Po (il a raté de peu l’ENA) se justifie brièvement : « Je m’interdis de trop penser pour les émissions diffusées sur M6 ». Ceci explique peut-être cela…
La télévision en chaîne
Mais M6 ce n’est pas seulement cette petite bête qui monte et qui plafonne en haut des charts du mauvais goût. C’est aussi un groupe qui possède une demi-douzaine de canaux sur le satellite et la TNT (Teva, M6 Music, Fun TV, TF6, Paris Première…) ; c’est aussi, jusqu’en 2007, le second actionnaire de TPS (qui sera bientôt racheté par CanalSat) ; c’est par ailleurs un producteur de cinéma en quête de nouveaux marchés et le propriétaire des Girondins de Bordeaux ; et depuis cette année, le groupe est devenu un concurrent direct de TF1 et Canal+ en ouvrant ses grilles de programme aux matchs de football.
Bien que répondant à un instinct délibérément « grégaire », le groupe M6 n’en est pas moins capable de produire des programmes de qualité, parfois même trop érudits pour pouvoir rester à l’antenne. Victime parmi d’autres, la remarquable émission de Thierry Ardisson Rive Droite / Rive Gauche (diffusée pendant quatre saisons sur Paris Première) n’a pas échappé à la dure loi de l’audimat. M. de Tavernost précise à ce sujet : « Une bonne audience c’est d’abord une bonne image ». Pas étonnant donc que Capital, magazine racoleur consacré à l’actualité économique, soit sa plus grande fierté.
Au sommet de la pyramide du PAF depuis plus de vingt ans, Nicolas de Tavernost est pour l’instant indétrônable. L’audimat semble formel : au pays de La Fontaine, il est décidément bien difficile de moucher les vieux lions.

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